Décret d’inscription d’une substance toxique à l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) : DORS/2018-129

La Gazette du Canada, Partie II, volume 152, numéro 14

Enregistrement

Le 22 juin 2018

LOI CANADIENNE SUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT (1999)

C.P. 2018-845 Le 21 juin 2018

Attendu que, conformément au paragraphe 332(1) référence a de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) référence b, la ministre de l’Environnement a fait publier dans la Partie I de la Gazette du Canada, le 1er avril 2017, le projet de décret intitulé Décret d’inscription d’une substance toxique à l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), conforme en substance au texte ci-après, et que les intéressés ont ainsi eu la possibilité de présenter leurs observations à cet égard ou un avis d’opposition motivé demandant la constitution d’une commission de révision;

Attendu que, conformément au paragraphe 90(1) de cette loi, la gouverneure en conseil est convaincue que la substance visée par le décret ci-après est une substance toxique,

À ces causes, sur recommandation de la ministre de l’Environnement et de la ministre de la Santé et en vertu du paragraphe 90(1) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) référence b, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Décret d’inscription d’une substance toxique à l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), ci-après.

Décret d’inscription d’une substance toxique à l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999)

Modification

1 L’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) référence 1 est modifiée par adjonction, selon l’ordre numérique, de ce qui suit :

Entrée en vigueur

2 Le présent décret entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Ce résumé ne fait pas partie du Décret.)

Enjeux

Dans le cadre du Plan de gestion des produits chimiques référence 2, le gouvernement du Canada (ci-après le gouvernement) a réalisé l’évaluation préalable référence 3 de 358 substances azoïques aromatiques et à base de benzidine référence 4, afin de déterminer si elles peuvent constituer un danger pour la santé humaine ou l’environnement. Une des substances évaluées était le N-[4-(2-hydroxy-5-tolylazo)phenyl]acétamide, connu sous le nom de Disperse Yellow 3, et également sous le nom de Solvent Yelow 77 référence 5 référence 6.

L’évaluation préalable a conclu que le Disperse Yellow 3 satisfait au critère environnemental de substance toxique, tel qu’il est défini à l’alinéa 64a) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [LCPE]. Par conséquent, le gouvernement du Canada inscrit cette substance à l’annexe 1 de la LCPE (liste des substances toxiques).

Contexte

Le 8 décembre 2006, le gouvernement du Canada a annoncé le Plan de gestion des produits chimiques (PGPC) pour évaluer et gérer les produits chimiques pouvant être nocifs pour la santé humaine ou l’environnement. Le Disperse Yellow 3 a été évalué dans le cadre du PGPC.

Description de la substance et sources de rejet

Le Disperse Yellow 3 est principalement utilisé dans les usines de textile au Canada pour la teinture du polyester, des mélanges de polyester, du nylon, des fibres de cellulose et des acryliques. Le Disperse Yellow 3 ne se dissout pas facilement dans l’eau et se présente souvent sous forme de cristaux de taille variable. Ces propriétés s’opposent à leur distribution uniforme dans l’eau, ce qui peut entraîner une coloration irrégulière. Afin d’améliorer le procédé de teinture, la substance est finement broyée, habituellement en présence d’un agent dispersant, et ensuite vendue sous forme de pâte ou séchée par pulvérisation et vendue sous forme de poudre aux clients qui utilisent le produit final dans la teinture des textiles. Au cours d’un procédé typique de teinture, le bain de teinture est préparé, ce qui comprend l’ajout de la teinture et d’un agent dispersant à de l’eau chaude.

D’après les renseignements fournis en vertu de l’article 71 de la LCPE, cette substance a été importée au Canada pour être utilisée comme colorant dispersé en une quantité comprise entre 100 et 1 000 kg en 2009, mais n’a pas été fabriquée au Canada. Moins de quatre installations ont été identifiées comme utilisant le Disperse Yellow 3 dans la formulation de produits chimiques pour le textile en 2006 et 2009. Les rejets de formulation de produits chimiques pour le textile dans le milieu aquatique sont estimés selon les quantités de colorants azoïques dispersés utilisés quotidiennement. Les autres paramètres considérés comprennent des facteurs de rejet dans les eaux usées, l’élimination par le système de traitement des eaux usées, le débit des eaux usées et de dilution dans le milieu aquatique.

En tout, 38 installations de teinture de textiles déclaraient avoir utilisé des colorants azoïques dispersés en 2005, en 2006, en 2008 et en 2010, d’après les enquêtes réalisées en vertu de l’article 71. Ces installations étaient situées dans trois provinces (l’Ontario, le Québec et la Nouvelle-Écosse). Il y a deux procédés qui contribuent principalement au rejet potentiel, par les eaux usées, de colorants dispersés par ces installations vers les milieux aquatiques : le nettoyage de la cuve de colorant après la préparation du bain de teinture et le drainage du bain lorsque la teinture est terminée. Environ 90 % de la quantité totale de colorant dispersé qui peut être rejetée dans l’environnement provient du drainage du bain de teinture, une fois la teinture terminée. Bien que quelques installations de teinture disposent d’un système de traitement des eaux usées sur place, la présence et le type d’un tel système de traitement varient d’une installation à l’autre. Par prudence, nous avons présumé que les colorants dispersés azoïques étaient rejetés dans le système d’égouts sans avoir été éliminés par un système de traitement des eaux usées présent sur place.

Résumé de l’évaluation préalable

Le gouvernement a réalisé une évaluation préalable du groupe de substances azoïques aromatiques et à base de benzidine, qui comprend le Disperse Yellow 3, afin de déterminer si ces substances satisfont à un ou à plusieurs des critères définissant une substance toxique, au sens de l’article 64 de la LCPE. De manière plus précise, il s’agit de déterminer si les substances pénètrent ou peuvent pénétrer dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à :

Les composantes portant sur la santé humaine et l’écologie de l’évaluation ont fait l’objet d’un examen externe par des pairs ou d’une consultation avec des spécialistes du Canada ou d’autres pays travaillant dans des organisations gouvernementales, des universités ou ailleurs. L’évaluation a permis de conclure que le Disperse Yellow 3 satisfait au critère définissant une substance toxique, au sens de l’article 64a), mais pas b) ou c) de la LCPE. Vous trouverez plus loin des résumés des composantes portant sur la santé humaine et l’écologie de l’évaluation du Disperse Yellow 3.

Évaluation des risques pour la santé humaine

En raison des propriétés du groupe de substances azoïques aromatiques et à base de benzidine, qui comprend le Disperse Yellow 3, la cancérogénicité a été généralement considérée comme l’effet le plus critique pour la santé humaine. Par conséquent, on a évalué le risque potentiel que présentent ces substances pour la santé humaine en examinant leur potentiel de risque, y compris la cancérogénicité, par rapport au niveau actuel d’exposition de la population générale au Canada. On a constaté au cours de l’évaluation préalable que le Disperse Yellow 3 pourrait causer le cancer, d’après les preuves basées sur une augmentation du nombre de tumeurs chez les rats et les souris dans le cadre d’une étude réalisée par le National Toxicology Program des États-Unis référence 7. En outre, cette substance a été classée comme cancérogène de catégorie 2 par l’Union européenne référence 8.

Bien que le Disperse Yellow 3 puisse présenter un risque pour la santé humaine, les niveaux d’exposition actuels estimés au Canada, qui comprennent l’exposition cutanée de la population générale (exposition aux colorants présents dans les vêtements et les produits en cuir) et l’exposition des nourrissons par voie orale (par la mise à la bouche des textiles), étaient suffisamment inférieurs au niveau d’exposition estimé auquel des effets critiques pour la santé se produiraient. Par conséquent, l’évaluation préalable a conclu que le Disperse Yellow 3 ne satisfait pas au critère défini à l’alinéa 64c) de la LCPE référence 9.

Évaluation environnementale

Le Disperse Yellow 3 peut être rejeté dans l’environnement lorsque les eaux usées résultant de la préparation de la teinture à textile ou de son utilisation dans la teinture des textiles sont déversées. Une fois rejetée dans l’environnement, elle devrait demeurer longtemps dans l’eau, les sédiments et le sol.

La concentration prévue dans l’environnement (CPE) de Disperse Yellow 3 dans les milieux aquatiques en aval des installations de préparation des colorants de textiles et de teinture des textiles a été estimée. Les essais de toxicité réalisés sur des poissons, des crustacés et des bactéries ont montré que les poissons et les invertébrés aquatiques subissent des effets nocifs lorsqu’ils sont exposés aux colorants azoïques dispersés. Des études de toxicité aquatique, revues par des comités de lecture, ont servi à calculer une concentration estimée sans effet (CESE) pour le Disperse Yellow 3. Aux concentrations égales ou inférieures à la CESE, aucun effet critique sur la survie, la reproduction et la croissance des organismes n’est prévu. Il existe un risque d’effets nocifs sur l’environnement lorsque les CPE indiquent que la concentration dans l’eau est plus élevée que la CESE, comme c’est le cas avec le Disperse Yellow 3.

D’après ces informations, l’évaluation préalable a permis de conclure que le Disperse Yellow 3 satisfait au critère de substance toxique tel qu’il est défini à l’alinéa 64a) de la LCPE. Cependant, la substance ne satisfait pas au critère défini à l’alinéa 64b) de la LCPE, car elle ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à mettre en danger l’environnement essentiel pour la vie référence 10.

Publication relative à l’évaluation et conclusions

Le 11 mars 2017, l’évaluation préalable finale sur certains colorants azoïques dispersés, y compris le Disperse Yellow 3, a été publiée sur le site Web du gouvernement du Canada portant sur les substances chimiques. D’après les résultats de l’évaluation préalable finale, les ministres ont conclu que cette substance satisfait au critère de substance toxique tel qu’il est défini à l’alinéa 64a) de la LCPE; par conséquent, ils ont recommandé l’ajout de la substance à l’annexe 1 de la LCPE référence 11.

Objectifs

Le Décret d’inscription d’une substance toxique à l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) a pour objet de permettre au gouvernement de proposer des mesures de gestion des risques en vertu de la LCPE afin de gérer les préoccupations environnementales potentielles associées au Disperse Yellow 3.

Description

Le N-[4-(2-hydroxy-5-tolylazo)phenyl]acétamide, dont la formule moléculaire est C15H15N3O2, est ajouté par décret à l’annexe 1 de la LCPE.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas, car le Décret n’impose aucun fardeau administratif aux entreprises.

Lentille des petites entreprises

La lentille des petites entreprises ne s’applique pas, le Décret n’imposant pas aux petites entreprises de frais de nature administrative ou liés à la conformité.

Consultation

Le 2 novembre 2013, le gouvernement du Canada a publié l’ébauche de l’évaluation préalable de certains colorants azoïques dispersés, dans laquelle la substance a été évaluée comme un colorant dispersé (appelé Disperse Yellow 3), ainsi que l’ébauche de l’évaluation préalable de certains colorants avec solvant azoïques, dans laquelle la substance a été évaluée comme un colorant avec solvant (appelé Solvent Yellow 77) référence 12. Toutes les publications étaient assujetties à une période de commentaires du public de 60 jours.

Au cours de la période de commentaires du public de 60 jours, aucun des commentaires reçus ne portait expressément sur le Disperse Yellow 3. Cependant, des commentaires ont été reçus au sujet des évaluations préalables des colorants dispersés et des colorants avec solvant en général référence 13. Il a été suggéré que seuls les colorants azoïques dispersés vendus dans le commerce devraient être jugés toxiques. En outre, une étude de toxicité a été présentée selon laquelle les substances colorantes azoïques dispersées ayant une masse moléculaire élevée référence 14 ne sont peut-être pas aussi dangereuses pour les organismes aquatiques que les colorants azoïques dispersés de faible masse moléculaire référence 15. En réponse à ces commentaires, le gouvernement a modifié la conclusion proposée à l’origine pour ces substances, afin de conclure que seuls les colorants azoïques dispersés de faible masse moléculaire trouvés dans le commerce posent un risque pour l’environnement. Comme le Disperse Yellow 3 était la seule substance répondant à ces caractéristiques, il a été conclu que seule cette substance est toxique. Un suivi pour les autres substances dont les propriétés sont similaires à celles du Disperse Yellow 3, et qui ne sont pas vendues dans le commerce au Canada selon les données obtenues et qui n’ont pas été incluses dans le groupe de substances azoïques aromatiques et à base de benzidine, est envisagé, y compris l’application de la disposition relative à une nouvelle activité (NAc), après consultation avec les parties intéressées.

Le 11 mars 2017, l’évaluation préalable finale de certains colorants azoïques dispersés, dont le Disperse Yellow 3, a été publiée dans le site Internet sur les substances chimiques du gouvernement du Canada. Le projet de décret et le résumé de l’étude d’impact de la réglementation ont été publiés le 1er avril 2017 en vue d’être l’objet d’une période de consultation publique de 60 jours. Aucun commentaire n’a été reçu sur le projet de décret.

Le ministère de l’Environnement et le ministère de la Santé ont avisé au préalable les gouvernements des provinces et des territoires, par l’entremise du Comité consultatif national (CCN) de la LCPE, de la publication de ces documents, ainsi que de la tenue de la période de commentaires du public susmentionnée. Le CCN référence 16 de la LCPE n’a pas formulé d’observations.

Justification

D’après les renseignements présentés et disponibles, le Disperse Yellow 3 peut être rejeté en quantités et en concentrations qui peuvent être dangereuses pour l’environnement aquatique (par l’intermédiaire des systèmes publics de traitement des eaux usées), en raison de son utilisation dans la préparation chimique des colorants, ou pour la teinture des textiles synthétiques au Canada. Les données toxicologiques indiquent que cette substance peut être dangereuse pour les organismes aquatiques et qu’elle peut demeurer longtemps dans l’eau, les sédiments et le sol. Par conséquent, d’après l’évaluation préalable, l’utilisation du Disperse Yellow 3 pourrait causer des dommages dans l’environnement au Canada et la substance satisfait au critère de l’alinéa 64a) de la LCPE.

Lorsqu’une évaluation préalable finale réalisée en vertu de l’article 74 est publiée, le paragraphe 77(2) de la LCPE stipule que les ministres doivent proposer l’une des mesures suivantes :

  1. ne rien faire;
  2. l’inscrire, si elle n’y figure déjà, sur la liste prioritaire;
  3. recommander son inscription sur la liste de l’annexe 1 et, sous réserve du paragraphe 77(4), la réalisation de sa quasi-élimination.

D’après les données scientifiques disponibles résumées dans le présent document, les données reçues de l’industrie au sujet de l’utilisation du Disperse Yellow 3 au Canada et les conclusions des évaluations scientifiques examinées par des comités de lecture et portant sur la santé humaine et l’environnement, le gouvernement a déterminé que les options « ne rien faire » et « ajouter la substance à la liste prioritaire en vue d’une évaluation approfondie » ne tiendraient pas compte adéquatement du risque de danger pour les organismes aquatiques dû à l’utilisation future du Disperse Yellow 3 au Canada. Des trois options prévues par la LCPE, l’ajout du Disperse Yellow 3 à l’annexe 1 de la LCPE est par conséquent l’option préférée référence 17.

L’inscription du Disperse Yellow 3 à l’annexe 1 de la LCPE n’entraîne pas de répercussions supplémentaires (avantages ou coûts) pour le public ou l’industrie, puisque le Décret n’impose pas d’exigences de conformité aux intervenants. Par conséquent, il n’y a pas de fardeau administratif ni de fardeau lié à la conformité pour les petites entreprises ou les entreprises en général. Au contraire, le Décret est un instrument habilitant qui permet à la ministre de proposer des activités de gestion des risques en vertu de la LCPE. L’approche de gestion des risques proposée a été publiée en mars 2017 référence 18.

Si la ministre détermine que la gestion des risques associés au Disperse Yellow 3 est requise, la ministre évaluera les coûts et les avantages, le cas échéant, et consultera le public et les autres parties intéressées pendant l’élaboration de tout instrument de gestion des risques.

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une évaluation environnementale stratégique a été réalisée dans le cadre du PGPC. L’analyse détaillée effectuée dans le cadre de l’évaluation stratégique indiquait que le PGPC aura des effets positifs sur l’environnement et la santé humaine référence 19 référence 20.

Mise en œuvre, application et normes de service

Le Décret ajoute le Disperse Yellow 3 à l’annexe 1 de la LCPE et permet l’élaboration et la publication de règlements ou d’instruments en vertu de la LCPE, si de telles mesures sont jugées nécessaires. Puisque l’élaboration d’un plan de mise en œuvre, d’une stratégie d’application de la loi ou de normes de service est jugée nécessaire uniquement dans le cas d’une proposition précise de gestion des risques, ces mesures ne sont pas considérées comme nécessaires pour le Décret.

Personnes-ressources

Julie Thompson
Division de la mobilisation et de l’élaboration de programmes
Ministère de l’Environnement
Gatineau (Québec)
K1A 0H3
Ligne d’information de la gestion des substances :
1-800-567-1999 (sans frais au Canada)
819-938-3232 (à l’extérieur du Canada)
Télécopieur : 819-938-5212
Courriel : eccc.substances.eccc@canada.ca

Michael Donohue
Bureau de la gestion du risque
Ministère de la Santé
Ottawa (Ontario)
K1A 0K9
Téléphone : 613-957-8166
Télécopieur : 613-952-8857
Courriel : michael.donohue2@canada.ca